Quand un accident du travail se produit sur une machine, ce n'est pas sur l'employé blessé que se concentrent les recherches, mais sur le fonctionnement de celle-là, qui demande peut-être à être revu, et aussi sur la manière d'utiliser ce fonctionnement, qui a été ou non bien expliquée à l'employé.
Or, chose curieuse, pour la compréhension d'un texte, c'est uniquement l'élève que l'on rend responsable de l'échec, et c'est lui qu'on soigne, alors qu'en général, il n'est pas malade du tout.
Et pourtant...

On sait aujourd'hui, que n'importe quel apprentissage oppose à celui qui doit apprendre, des aspérités, des résistances, qu'on appelle des obstacles "épistémologiques". Cet adjectif bizarre signifie simplement que ce sont des caractéristiques de l'objet à apprendre, qui s'opposent aux représentations spontanées de l'enfant (de celui qui apprend, même s'il est adulte), et qui constituent donc pour lui des obstacles à franchir.
On a pu dire que le métier d'enseignant consiste à aider les élèves à franchir ces obstacles.
En fait, ce qu'on appelle une "leçon" a pour objectif, non de "transmettre" un savoir aux élèves, mais de les aider à franchir un des obstacles spécifiques que présente l'apprentissage de ce savoir.
Notons au passage que c'est pour cette raison qu'il ne peut y avoir qu'un seul objectif d'apprentissage dans une séance : on ne franchit pas plusieurs obstacles en même temps.

Je voudrais donc revenir ici sur l'exemple que David a cité dans son commentaire du 15 septembre : le problème de Jean, le fermier, où l'on retrouve celui qui est bien connu sous le nom de "problème de l'âge du capitaine".
Je rappelle ce problème, tel que David l'a testé dans sa classe :

Ex : Jean est fermier, il a 17 poules et 23 vaches. Quel âge a Jean ?
Pour ma classe de 31,
20 élèvent répondent 40 ans (soit 17+23) 2 : 30 ans (même procédures que les autres mais avec une erreur de calcul),
5 : Il a forcément plus de 30 ans (ou 18 ans) car un fermier a plus de 30 ans !
2 : Je ne réponds rien car il y a un piège
2 : On ne peut pas savoir…
Seulement 2 sur 31 approchent de la solution : on ne peut pas savoir, car il nous faut son année de naissance.

Ce qui est passionnant dans les réponses des enfants, c'est d'abord de voir qu'ils sont loin de répondre n'importe quoi, et qu'il n'y a pas lieu de les accuser de ne pas réfléchir. En fait, elles nous fournissent un joli panorama de leurs représentations spontanées, notamment de qu'est pour eux un problème de mathématiques, et de la manière dont ils raisonnent, face à une tâche.

Or, on sait que c'est ce versant positif qu'il faut faire évoluer et non perdre du temps à "corriger leurs erreurs", même en le faisant gentiment.
Alors, je vous propose de nous dire comment vous interprétez ces résultats, et ce que vous feriez pour les faire évoluer, y compris chez ceux qui "ont trouvé le solution".
Au nom de tous les collègues que vous aidez ainsi, merci à vous.