Enseigner le français

Vivre ensemble : promenade alphabétique en marge de la classe, dans une réflexion-rêverie sur la vie avec les autres.

A, comme "abri"

Vivre ensemble, à deux, à plusieurs, en couple, en ami, en copains... pas facile. Les "gamelles" peuvent pleuvoir, Et il n'est pas toujours évident de savoir comment les recevoir ni surtout comment y répondre.
 J’ai un ami qui explique que, lorsque sa bien-aimée pique une colère un peu trop forte,  il « met son casque lourd et descend aux abris ».
 Plaisante et sage formule d’ancien combattant.
 Mais ce n’est pas forcément la réaction de tous, ni, sans doute, celle à laquelle on pense en premier.
 Il y a bien des façons de répondre à une « gamelle ».
 

On peut tendre la joue gauche.
 Sublime réaction… qui n’est pas sans dangers ! Surtout difficile à tenir longtemps.
 Mais elle a un avantage : celui de désarmer parfois l’adversaire. A l’image de ces héros de polar qui menacés par un 6/35, lancent avec un calme olympien : « Mais tire donc, ose le faire !! »
 Ça marche… surtout dans les séries télévisées.

Il y a aussi ceux qui boudent et qui font la gueule.
 Pas marrant… et un choix dangereux de réponse, car il est très difficile d’en sortir.
 On sait que, au moment où le boudeur veut revenir, s’il est accueilli par un « Alors, ça va mieux ? Tu boudes plus ?? », sa bonne volonté risque d’exploser en miettes et la bouderie de repartir de plus belle… !

 En fait, le plus souvent, la réaction, c’est d’envoyer une autre gamelle, plus dure et plus blessante.
 Il est vrai que ça fait du bien… à celui qui l’envoie bien sûr.
 Mais surtout, cela ne fait qu’aggraver les choses et attiser l’incendie.
 Escalade de méchancetés… à éviter à tout prix. (On pourrait passer l’info à certains Etats qui ne savent pas réagir autrement… Suivez mon regard !)
 Parfois, la gamelle de retour utilise un humour grinçant et venimeux, tout aussi blessant, mais qui a l’avantage de pouvoir éventuellement faire rire… à condition que l’adversaire ait un sens de l’humour disponible, ce qui n’est pas toujours le cas, quand on est en colère.

 Et puis, il y a l’abri. Le rire, justement, en est un.
 A mon avis, c’est le meilleur… Mais il faut être deux de cet avis pour qu’il fonctionne…
 L’abri, en général, c’est plutôt la fuite et l’absence.
 On connaît le mot de Bussy-Rabutin : « L’absence est à l’amour ce que le vent est au feu : elle éteint le petit et rallume le grand ».
 Pari intéressant et fort : « on verra bien… ». Une excellente mise à l’épreuve des sentiments, et quand le rire est impossible, c’est la solution la meilleure. Attendre que le lait retombe, attendre que l’adrénaline se calme. Essayer de n’y plus penser et être patient.

Je crois surtout que l’essentiel est de savoir ce qu’on veut, d’avoir une hiérarchie de valeurs bien claire, et d’être cohérent avec cette hiérarchie. Priorité à ce qui vaut la peine !
 Pour moi, rien, aucun principe, ne mérite qu’on saccage une relation affective : on n’a qu’une vie, que diable ! Et bien courte en plus.
 Donc, aucun orgueil, surtout : ce n’est jamais s’abaisser que de faire les premiers pas. Et il faut souvent en faire beaucoup…
 

Quand on voit, comme moi, dans le petit cimetière du village de mon enfance, côte à côte, dix tombes d’êtres qui se sont insultés, fâchés, séparés, blessés, durant leur vie, et qui dorment, là, à cinquante centimètres les uns des autres, on se dit que les fâcheries, les vexations, les guerres et les principes sont vraiment une vaste foutaise, et qu’on doit tout faire pour les éviter.
 Des gamelles, vous ne pensez pas qu'elles seraient plus à leur place si elles servaient à nous préparer de bonnes bouffes ensemble ?
 Une bonne idée, non ?

 

 

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