C’est un type d’écrits qui présente une infinie diversité, responsable des difficultés à le caractériser en tant que type. On ne peut pas dire que tous ces écrits aient en commun une structure narrative, ou une fonction sociale. Leur seul point commun est d’appartenir à un “dire de l’imaginaire”, ce qui leur confère seulement un “air de famille”.
Pour les enfants, une première difficulté réside dans la confusion entre le récit, pris ici au sens le plus large de “écrit qui raconte”, et la simple relation de faits, se succédant de façon chronologique ou aléatoire (ce qui est souvent le cas des récits d'élèves).
Le récit, se reconnaît à ce qu’il ajoute à la chronologie, une dimension logique : des liens de cause à effet, relient les actions. De plus, dans un récit, l’action n’est pas aléatoire, elle est provoquée par un mobile : il y a une raison d’agir, qui est en général un problème à résoudre par celui qui agit.
Or, ces nécessités, liées aux contraintes physiques et socio-culturelles de notre monde, sont loin d’être évidentes pour les enfants. Il arrive souvent, dans ce qu’ils racontent par écrit, qu’il ne se passe rien, ou pas grand-chose, ou que des événements tombent du ciel, en plein milieu du texte, sans que soient explicitées les raisons de cette arrivée ; souvent, on ne sait pas où les choses se passent, ni pourquoi. D’où l’importance d’un travail approfondi sur ces points, et d’une grande rigueur dans les propositions d’écriture que l’on fait aux enfants : les laisser écrire ce qui leur passe par la tête, sous prétexte de préserver leur “expression personnelle” (? ? !), c’est les empêcher de comprendre le fonctionnement des récits, et handicaper par avance leur savoir écrire.
Mais la littérature, ce n’est pas seulement le récit.
Elle intègre la notion de genres, roman, nouvelles, théâtre, poésie etc. D’où la nécessité, en lecture comme en production, de travailler aussi sur le théâtre, et sur la poésie, et tous les autres genres littéraires. De plus, on sait que la littérature peut traiter toutes sortes de sujets et présenter toutes sortes d’écrits existant en dehors d’elle : il existe des romans en forme de lettres, des poèmes en forme de recettes, ou de fiches de fabrication, etc. Comme ni la ressemblance avec des écrits sociaux, ni les sujets traités ne permettent de distinguer les écrits non littéraires des écrits littéraires, la première question qui se pose est de savoir ce qui les différencie véritablement. Par-delà les innombrables débats sur cette question, on peut dire de façon très claire que la véritable différence entre ces deux grandes familles d’écrits, ce sont les règles d’écriture auxquelles elles obéissent.
Les écrits non littéraires sont soumis aux règles sociales de la communication, et dépendent donc essentiellement des destinataires, et des enjeux , sans oublier les coutumes sociales qui se sont organisées au cours des siècles.
Les écrits littéraires, eux, obéissent aux règles que leurs auteurs ont décidé de se donner, règles de genre (elles aussi établies par la tradition : règles de sonnet, de la nouvelle, du théâtre etc.), mais aussi règles de choix des mots (champs lexicaux, ou échos de sonorités, rimes, assonances, distorsions de formulations etc. etc.)
Ce sont donc ces types de règles qui doivent être évoquées dans les consignes d’écriture proposées aux élèves : règles sociales, pour tous les écrits sociaux (courrier, presse, écrits scientifiques etc.. .), règles de jeux d’écriture pour les écrits à visée littéraire