De toute évidence, ce correspondant a été choqué par le choix très "parlé" de la question. Pour lui plaire, j'eusse été bien avisée d'utiliser plutôt quelque chose comme :
Où est le laxisme, finalement ?
Le laxisme, où est-il finalement ?
Mais j'aurais pu aussi écrire :
C'est où qu'il est, le laxisme, finalement ?
ou encore :
Où est-ce qu'il est, finalement, le laxisme ?
sans oublier :
Finalement, bordel de bordel, où c'est-ti qu'il est, ce putain de laxisme ?

On pourrait en trouver beaucoup d'autres. Et il est bien évident que chacune de ces formulations ne produit pas le même effet. Et notre correspondant, un peu limité quant à sa vision du fonctionnement de la langue, aurait pu songer qu'une agrégée de grammaire classique ne choisit pas ses formulations au hasard.
Mais il en est resté à une conception un peu obsolète de la langue, selon laquelle il y aurait une façon de parler convenable, — le célèbre "bon usage" de Maurice Grévisse — le reste étant à rejeter comme non conforme aux bonnes mœurs.
C'est oublier que toute langue est définie par l'usage de ceux qui l'utilisent, que ses règles de fonctionnement se dégagent de cet usage, qu'elles n'ont pas été posées a-priori et qu'on n'a rien à appliquer mécaniquement.
Depuis plus d'un siècle, les Chercheurs en sciences du langage ont mis en évidence que l'on ne communique (à l'oral, comme à l'écrit) jamais pour dire seulement, mais pour agir sur ceux à qui l'on s'adresse. On s'adresse à quelqu'un pour le convaince, le blesser, l'émouvoir, le déstabiliser, se faire aimer de lui, se faire admirer...etc. etc.
Toute production langagière est définie par la situation de communication qui l'a provoquée, c'est-à-dire, par les enjeux qui étaient les siens : qui parle, à qui, pour obtenir quel résultat.
Une production langagière n'a donc à être jugée qu'à l'aune de son efficacité. Les choix langagiers ne dépendent point de ce qu'on a à dire, mais du résultat attendu.
Rappelons, pour le plaisir, la célèbre réponse que l'Académicien Jacques de Lacretelle fit, en pleine séance de l'Académie, à un collègue qui s'excusait de lui avoir prêté des propos n'étant pas les siens :
"Merci, cher collègue. En vérité j'eusse été fâché que vous m'imputassiez cette connerie !"
Bel exemple de ce qu'on peut appeler la maîtrise de la langue !
Il est assuré aujourd'hui que le "bon usage" de la langue, c'est le bon usage des choix, parmi toutes les formulations possibles, en fonction de la situation de communication et, notamment, en plus du but conscient ou non de la prise de parole, de ses aspects non objectifs que sont :
1- l'image que celui qui parle a du destinataire,
2- celle qu'il a de lui-même,
3- celle qu'il a de l'opinion que le destinataire a de lui.
Une situation de communication est loin d'avoir la simplicité qu'on lui a prêtée longtemps. C'est un lieu de variations et un entrelacs de représentations en miroir, incompatible avec une application de règles toutes faites.

Un tel constat permet de définir clairement ce que doit être une pédagogie de la maîtrise de la langue :
1- permettre à tous les enfants d'avoir à leur disposition, le plus grand choix possible de formulations, ce qu'apporte une politique de la lecture sur des textes à la fois authentiques (c'est-à-dire, produits dans des situations de communications véritables, dont les données sont repérables), et diversifiés ;
2- connaître, et admettre comme telles, les origines géographiques et historiques de certaines formulations : on ne parle pas à Québec comme à Strasbourg ou à Tournai, et on ne parlait pas au siècle dernier comme aujourd'hui.
3- connaître les jugements que la Société porte sur ces formulations = ce qu'on appelle les "normes" du langage, qui ne sont point linguistiques mais sociales. C'est un des aspects essentiels de l'enseignement de la grammaire.
4- entraîner les enfants à analyser les données spécifiques, objectives et personnelles, des situations de communications qu'ils ont à vivre : à qui je m'adresse (donc quelles contraintes sociales cela présente); et qu'est-ce que je veux comme résultat de mes propos.
5- ne faire vivre, à l'oral, comme à l'écrit, que des situations effectives de communication où ces questions peuvent avoir des réponses.
On est loin de la rédaction à sujet et des règles de Bled à appliquer...
Le problème, c'est que ce n'est pas ce que disent les textes officiels... La conséquence est claire et le choix évident : on fait la classe pour que tous les enfants réussissent ou... pour plaire au Ministre ???